Des populations parlant un même type de langue ont émigré par vagues successives entre 6 500 et 5 500 av. dans toute l’Europe et en Inde, d’où le nom de cette famille de langues qualifiée par la suite d’indo-européenne. → À lire Les langues du a fallu attendre le XIXe siècle, et notamment la découverte d’une très ancienne langue d’Inde, le sanskrit, pour constater que des langues apparemment aussi différentes que le latin, l’anglais, l’allemand, le breton, le russe, le persan, ou le français, présentaient de nombreuses ressemblances et remontaient vraisemblablement à une même langue l’ fortes ressemblances Latin mater frater pater sorror Anglais mother brother father sisterAllemand mutter bruder vater schwesterBreton mamm breur tad c’hoarRusse mat brat atets siestraPersan modar baradar pedar khalar Français mère frère père sœurLa langue française, en grande partie, issue du latin parléDe même que le latin, le gaulois fait partie de la famille des langues européennes. Lorsque les Romains ont conquis la Gaule en 52 av. le latin parlé des soldats et des fonctionnaires romains s’est rapidement répandu ; dès le IVe siècle, la langue gauloise avait presque totalement disparu au profit d’un latin déformé par l’accent gaulois, et imprégné de mots germaniques correspondant aux diverses invasions. Très largement issu du latin parlé, le français compte encore une centaine de mots gaulois comme alouette, balai, bouleau, bruyère, caillou, char, chemin, chêne, druide, dune, glaise, lande, ruche, soc, tonneau… près de mille mots germaniques comme balafre, blafard, blanc, bleu, brun, butin, danser, effrayer, galoper, garder, gâteau, guère, guerre, guetter, hache, maréchal, orgueil, riche, sale, tomber, trop…→ À lire Le français IXe – XIIIe siècle, encore proche du latinLe premier texte en français dont nous ayons connaissance date de 842. Il s’agit des Serments de Strasbourg échangés entre Louis le Germanique, de langue germanique, et Charles le Chauve, de langue française, contre leur frère Lothaire, chacun s’exprimant dans la langue de l’autre, et non en latin comme c’en était la France se divisait alors en deux zones linguistiques on distinguait, dans le Midi, les dialectes où oui se disait oc, appelés par la suite dialectes de langues d’oc, et dans le Nord, les dialectes où oui se disait oïl, définissant ainsi les langues d’oïl. Les dialectes d’oïl furent prépondérants dans la mesure où Paris devint la capitale des rois l’ancien français en est grands textes littéraires ont été écrits en ancien français du XIe au XIIIe siècle, textes écrits en vers et souvent chantés comme la Chanson de Roland, qui relate des faits de chevalerie sous Charlemagne, ou les romans courtois, avec, par exemple, Lancelot pour héros. → La littérature française Le Moyen le latin, l’ancien français comportait des déclinaisons selon la fonction du mot dans la phrase, la terminaison en était différente. Ceci permettait de disposer les mots dans un ordre plus libre qu’en français moderne. Des six terminaisons du latin, ne sont restées en ancien français que celles du sujet et du la suite des invasions des Vikings en Normandie Xe siècle et de la constitution de l’empire arabe du VIIIe au XIVe siècle, la langue française s’est enrichie en empruntant des mots qui lui manquaient. — Quelques emprunts à la langue normande comme agrès, crique, hauban, vague, varech… — Quelques emprunts à la langue arabe comme alambic, amiral, chiffre, coton, douane, échec, goudron, hazard, magasin, orange, sirop, sucre, zéro…Articles connexes → L’emprunt. → Les mots français d’origine arabe. → Les mots latins admis en français. → Lumière sur la langue arabe, les chansons de geste, la Chanson de Roland et renaissance du français XVIe siècleLe français a continué à évoluer aux XIIIe et XIVe siècles, les déclinaisons disparaissent peu à peu. Au XVIe siècle, l’ordre des mots sujet, verbe, complément devint désormais déterminant. L’enseignement s’effectuait toujours en latin, mais les écrivains souhaitaient que le français devienne une grande langue littéraire. On s’inspira alors, comme les Italiens l’avaient déjà fait, des œuvres et des idées des écrivains grecs et latins de l’Antiquité que l’on traduisit. Il s’agissait donc d’une renaissance ».Au XVIe comme au XVe siècle, la langue française est marquée par l’adaptation de beaucoup de mots latins comme académie, agriculture. S’y ajoutent la multiplication des suffixes diminutifs maigrelet, la construction de mots composés aigre-doux et l’emprunt d’environ 2000 mots à l’italien comme artisan, brave, caporal, carnaval, charlatan, concert, escalier, façade, infanterie, sonnet…Le français du XVIIe et du XVIIIe siècles une langue qui se fixeÀ la fin du XVIe siècle, la langue française perd de son unité, et dès le début du XVIIe siècle, Malherbe, poète de la cour, cherche à discipliner la langue littéraire en faisant par exemple la chasse aux mots anciens, aux mots inventés, familiers, provinciaux ou 1635, Richelieu fonde l’Académie française et, en 1694, paraît la première édition du Dictionnaire de l’Académie qui devait fixer le sens des mots, un sens souvent plus fort qu’aujourd’hui un déplaisir est une profonde douleur et un ennui, un chagrin XVIIIe siècle, la langue reste classique et s’affirme. Quelques mots sont empruntés à l’anglais meeting, budget…Le français actuel une langue multipleAprès la Révolution française, au début du XIXe siècle, la langue s’est enrichie de nouvelles idées et donc de nouveaux mots ; les écrivains romantiques ont élargi leur vocabulaire avec des mots issus des pays orientaux et ont utilisé divers registres de XXe siècle, et notamment à la fin du siècle, les progrès de la technologie ont fait se développer les vocabulaires techniques, parfois repris dans la langue d’origine, souvent l’anglais développement des médias, notamment de la radio et de la télévision, ont mis en contact les multiples variantes du français, du verlan ripou, rebeu, meuf, keuf aux vocabulaires issus des progrès techniques cédérom, internaute, zapper nouvelles constructions de mots se développent, comme les mots-valises informatique où se mélangent information et automatique.📽 15 citations choisies sur la langue française→ Retrouvez la liste des citations 15 citations sur la langue connexes L’Académie française. Les langues du monde. Langues du monde Le latin. – Le grec. – L’anglais. – L’arabe. La langue et le langage. La toute première langue. Histoire de la littérature française. Histoire résumée du vocabulaire français. L’alphabet. La lexicographie. L’étymologie. La néologie. L’emprunt. Les personnages littéraires dans la langue française. L’idiotisme. Les gallicismes. Le barbarisme et le solécisme. Les solécismes définition et types. Vocabulaire thématique Mots les plus bizarres ou mignons de la langue française Partie 1. – Partie 2. – Partie 3. 15 mots les plus longs de la langue française. Mots français souvent mal prononcés Partie 1. – Partie 2. – Partie 3. Leçons de grammaire. – Leçons de vocabulaire. – Leçons d’orthographe. – Leçons d’expression écrite. Exercice Non aux anglicismes ! Lumière sur les symboles de la République de livres
Un thème d'étude en sciences, qui va nous permettre de mettre en oeuvre la démarche scientifique et compléter notre cahier d'expériences et d' trouverez à la fin de cet article des liens pour exploiter, continuer ce thème en littérature. Evidement, lorsque l'on aborde ce thème en classe, c'est également le temps des plantations dans des pots de yaourts ou autres, nouvelles idées glanées sur Pinterest Le plus visuel * pour bien visualiser la germination de la graine. Le plus écolo * plantations dans des rouleaux de papier toilettes Le plus visuel 2 * pour bien visualiser la croissance des plantes, astucieux, non ? Désolée pour la photo, je n'arrive pas à la redresser. En l'absence de coton, nous avons utilisé des essuie-tout, cela fonctionne également très bien. Ma petite jardinière de classe, on peut même utiliser de petites bouteille de 33 cl, pour faire de petites jardinières individuelle. Une année, j'ai utilisé des demi bouteilles de lait que nous avions décorés, pour être offertes à la fêtes des mères, avec plantations de capucines. J'ai testé en classe, il faut bien fermer le bas de la pochette. Je l'avais fermé avec du simple ruban adhésif, mais côté étanchéité, ce n'est pas formidable. Avec le contre jour, cela ne se voit pas trop, mais cela fonctionne très bien. Le plus visuel 3 * pour bien visualiser, la croissance des plantes, un simple petit sachet, astucieux, non ? Les graines que j'utilise habituellement, car elles germent bien radis, haricot, petit pois, lentille. Et pour les fleurs, je vous conseille les capucines. ............................................... * Je vous mets ma fiche de préparation de séquence attention, elle est très succincte, c'est un simple fil conducteur. * Fiche de préparation de séquence * Relevé d'observations ............................................... * Je vous présente la séquence détaillée d'Azertyy, avec les fiches de séquence, les affichages, les fiches élèves, l'évaluation * Fiches séquence + fiches élèves et évaluation * Affichage séance 2 * Affichage séance 2 ............................................... * Mes diaporamas Le cycle de vie du marronnier, et la dissémination * Cycle de vie du marronnier * La dissémination ............................................... Des documents sur le cycle de vie du haricot et un sur le cycle de vie du pommier fiches élèves et vidéos * Fiche élève * Fiche élève et correction Germination d'un haricot Germination d'un haricot planté dans la terre Cycle de vie d'une plante, vidéo animée, en espagnol, très bien faite Cycle de vie du pommier ............................................... Des vidéos sur le cycle de vie des plantes sur le site Canopé, les fondamentaux ici Une vidéo c'est pas sorcier ici Défi LA MAIN À LA PATE Comment faire germer une graine ici ............................................... Des ressources pour aborder le thème Toujours rien ? très simple, permet d'aborder la germination et la croissance. Mon exploitation en lecture ici Quel radis dis donc ! Mon exploitation icipour commander Splat adore jardiner Mon exploitation icipour commander
9782266086318 ISBN13. 1-8. Avantages Eyrolles.com. Livraison à partir de 0,01 € en France métropolitaine. Paiement en ligne SÉCURISÉ. Livraison dans le monde. Retour sous 15 jours. + d' un million et demi de livres disponibles.
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Il est difficile de parler de souveraineté numérique sans parler du monde immatériel dans lequel elle s’inscrit. La naissance du monde immatériel est attribuée aux Etats-Unis d'Amérique. Son développement correspond aux enjeux militaires et technologiques de ce pays. Il est donc difficile d’aborder cette problématique sans l’associer à la réalité des rapports de force entre le fut jadis le cas jadis pour monde matériel, le monde immatériel est un monde à conquérir. La suprématie technologique permet de créer des situations de dépendance durable. Elle favorise les pays qui mettent en œuvre une politique de puissance. Il est impossible de parler de souveraineté sans traiter la question de la recherche de suprématie et le refus de la dépendance dans les rapports de force entre puissances. Les enjeux pour l’entrepriseDans le passé, la France a rencontré un problème important à propos de l'informatique l'incapacité de finaliser une politique de puissance dans le domaine de l'industrie informatique. Les entreprises n'avaient pas suivi De Gaulle. Les plus importantes se focalisèrent sur leurs intérêts en termes marché. Elles ne se reconnurent pas dans la nécessité d'appuyer une politique de recherche de puissance. Aujourd'hui nous sommes dans un cas de figure assez similaire. La grande majorité des entreprises françaises ont bien du mal à identifier leurs intérêts dans la construction d'une politique de souveraineté dans l'économie numérique. Et encore moins dans une politique de puissance si un pouvoir politique décidait de se lancer dans cette voie. Leur constat est simple il est trop remontées d'information par le biais de l'intelligence économique soulignent que les entreprises françaises acceptent de dépendre des technologies américaines et bientôt chinoises. Après l'affaire Snowden, j'ai participé à un colloque français de RSSI qui me rapportèrent l'anecdote suivante. Plusieurs comités exécutifs annulèrent des dispositions prises avant l'affaire Snowden dans le domaine de l'externalisation de certaines activités dans le domaine des systèmes d'information de peur qu'un incident majeur leur fasse perdre la face à posteriori. Ces décideurs n'avaient tenu aucun compte des rapports de force entre puissances et des risques qu'ils prenaient en niant leur réalité dans leurs secteurs d'activités. La première urgence est donc de mettre le monde de l'entreprise devant ses responsabilités sur cette question. Tant qu'il n'y aura pas une convergence de vues entre le pouvoir politique, les représentants de l'administration et les acteurs du secteur privé sur la manière de concevoir une politique d'accroissement de puissance dans l'économie numérique, le débat se figera sur les plus petits dénominateurs communs d'une politique de souveraineté. Autrement dit, je suis désolé de le dire ainsi, mais il ne dépassera pas le stade de la surveillance des mauvaises pratiques et de leurs éventuelles aspects stratégiques de la conquête du monde immatériel ne relèvent pas des autorités de contrôle. Dans ses effets majeurs, la politique de conquête s'articule avec une politique de puissance. Rappelons-nous dans le cas des Etats-Unis à l'origine, ce qui allait devenir ensuite Internet est né d'un besoin de survie informationnelle en cas de confrontation nucléaire. Les GAFAM sont l'expression économique privée d'une volonté de détenir une suprématie dans les activités marchandes de l'économie numérique. Ce n'est pas un hasard si la Chine a refusé de dépendre des GAFAM et a construit les siens. La seconde urgence est d'évaluer le coût d'une situation de dépendance la France et l'Union Européenne sont globalement dépendantes des technologies numériques américaines. Cette situation est-elle souhaitable à moyen et long terme ? La manière dont est abordée la question du stockage de données révèle les différences de grille de lecture de la souveraineté selon que l'on se situe dans le monde occidental, en Chine ou en Russie. Pour les entreprises des pays dépendants, la localisation du stockage dans une recherche de souveraineté est marginalement pris en compte. Pour les entreprises chinoises, russes, et demain indiennes, elles devront s'aligner ou prendre fortement en compte le refus de la dépendance exprimée par leurs autorités politiques. La troisième urgence est la prise en considération de l'enjeu majeur de l'usage commercial des ne faut pas se contenter d'analyser le problème sous l'angle de la protection des données personnelles. Véritable or noir du monde immatériel, l'accès aux donnée ou le data est le point d'entrée de la conquête des marchés du monde immatériel. L'analyse du fonctionnement des GAFAM en est la démonstration la plus didactique. Cette réalité était déjà perceptible avant l'explosion de la bulle Internet au début de ce siècle. Une start-up américaine de WEB TV si ma mémoire est bonne présentait son plan marketing en expliquant que plus elle collecterait d'informations sur ses clients, mieux elle pourrait répondre aux attentes de ses clients mais aussi les orienter vers d'autres choix. La législation américaine permet ce genre de démarche. A contrario, un groupe français perd aujourd'hui 15% de son chiffre d'affaires parce que la CNIL lui interdit de conserver la mémoire du compte bancaire de ses clients. Son concurrent le plus important, américain, est basé au Luxembourg et n'est pas soumis à la même contrainte. Résumé de l’intervention de Christian Harbulot, datée du 23 mai 2019 devant la Commission d'enquête sur la souveraineté numérique au Sénat.45. Récapitulation: l'articulation du temps et de la temporalité 560 § 46. La finitude de la temporalité 568. a) Le pré-temps immémorial de la naissance 568. b) L'après-temps indisponible de la mort 574. c) La finitude de l'aventure et l'excentricité de son sens 583 § 47. L'unité de mes histoires 587. a) La multiplicité des
1L’intérêt pour les interactions de la science et de la littérature n’est pas nouveau. En 1925, Alfred Whitehead remarquait que 1605 était l’année de publication de The Advancement of learning de Bacon et de Don Quixote de Cervantès [1]. Michel Serres a quant à lui éclairé de nombreux aspects du développement parallèle des œuvres scientifiques, philosophiques et littéraires, faisant du XVIIe siècle l’un des passages » privilégiés entre les sciences de l’homme et les sciences exactes [2]. Ainsi, dans Feux et signaux de brume, il affirme fortement la nécessité de dépasser les barrières posées entre la science et la littérature [3]. Il réunit d’un geste l’histoire des sciences et l’histoire de la littérature, toutes deux emportées dans le vaste mouvement de l’histoire occidentale 2S’il existe une histoire des littératures et s’il existe une histoire des sciences, ce dont il y a histoire, dans les deux cas, prend naissance et se développe dans une société qui a ses partages, ses moyens de produire, ses mœurs, sa politique, son environnement biophysique. Et je ne vois pas comment faire deux parts, il s’agit de la même histoire, au même endroit, dans le même courant chronique et pour les mêmes classes. [4] 3Pourtant il y a bien deux parts. Michel Serres en fait ainsi le diagnostic et la généalogie 4Les rapports entre ce qu’on est convenu de dénommer la science et ce qu’on a décidé d’appeler littérature n’ont jamais été vraiment éclaircis. Au niveau de la critique, s’entend. Pour la production elle-même, la situation est inverse. Rares sont les auteurs ou les œuvres tout à fait extérieurs à la science du temps […]. Nul n’a écrit derrière un mur, où protéger frileusement sa peau, mais sur un espace compact de communication. Alors survint l’école. Ou les écoles. Fondée, quelle qu’elle soit, sur une partition la classification des sciences. Les alvéoles séparées, les bâtiments épars, les bibliothèques disjointes. Diderot est un bel espiègle, il ne connaît plus la chimie, Montesquieu ignore Newton, Montaigne n’écrit que de soi et Pascal que de Jésus-Christ. La seule solution est un éclat de rire. Les spécialistes fabriquent, en rétroaction, des imbéciles ennuyeux. Le fameux problème des rapports entre science et littérature n’est qu’un artefact. Il y a grille, mais nous l’avons posée. Si légère et fragile que la supprimer n’exige qu’une pichenette. [5] 5À la suite de ces travaux fondateurs s’est amorcée à la fin des années 1970 une réflexion d’ensemble sur les rapports entre les différents domaines du savoir. Les études littéraires, notamment, ont opéré un vaste mouvement d’ouverture. Qu’il s’agisse d’une réaction face à ce qu’on a appelé le formalisme ou le textualisme des années 1970, d’un besoin de renouvellement des objets d’étude ou d’une vague de fond plus large en faveur des approches interdisciplinaires, l’intérêt pour le rapprochement des textes littéraires et scientifiques est l’une des conséquences les plus frappantes de ce phénomène d’ouverture des frontières disciplinaires. Alors que ce domaine d’étude hybride a gagné ses lettres de noblesse et sa légitimité, il reste fructueux de s’interroger sur les motivations et l’origine de ce mouvement interdisciplinaire au sens fort, et sur les conséquences, pour les études littéraires comme pour l’histoire des sciences, de leur rapprochement. 6L’étude des relations de la littérature et de la science est devenue depuis trente ans, surtout dans le monde universitaire anglo-saxon, une discipline à part entière [6]. Concernant la période classique, les travaux fondateurs de Marjorie Nicolson avaient démontré dès le milieu du XXe siècle la fécondité d’une méthode rapprochant histoire des sciences et littérature [7]. Cette approche, cependant, restait centrée sur le canon littéraire et n’incluait les textes scientifiques que comme comparants. C’est l’ouvrage de Fernand Hallyn en 1987, La Structure poétique du monde Copernic, Kepler, qui constitue à bien des égards un jalon décisif en proposant l’analyse poétique de textes astronomiques, et en ouvrant la voie à une série d’études interdisciplinaires [8]. Parallèlement se sont développés des domaines d’étude connexes tels que l’histoire des idées et la cultural history [9], l’histoire de la naissance du roman dans son articulation avec le discours scientifique [10], l’approche rhétorique [11], constituant le vaste champ disciplinaire regroupé sous la formule littérature et science ». Les récents travaux parus dans ce domaine proposent d’unir ces différentes approches, et font le pari qu’il peut être fécond non seulement d’aborder des textes scientifiques avec les outils de l’analyse littéraire, d’une part, et d’étudier des textes littéraires en prenant en compte leurs sources » scientifiques, d’autre part, mais de réunir ces deux corpus et ces deux méthodes afin de faire émerger une ou plusieurs poétiques spécifiques du discours scientifique dans une période donnée. Étudier ensemble des textes littéraires et des textes scientifiques, ce n’est pas réduire leur hétérogénéité, encore moins nier leurs différences essentielles en termes sémiotiques et épistémiques. Mais cette méthodologie propose d’entrer dans ce matériau hétérogène sans lui imposer au préalable nos distinctions disciplinaires ultérieures, et sans préjuger a priori de l’appartenance de ces textes à l’un ou l’autre corpus, afin de faire émerger des traits communs et des spécificités nouvelles. En privilégiant un autre classement, on peut espérer saisir des orientations communes, des stratégies d’écriture partagées, des emprunts poétiques, des thématiques transversales. C’est à partir de ce socle que l’on peut alors tenter d’esquisser non pas une frontière mais des usages spécifiques, en littérature et en science, d’outils poétiques communs [12]. 7Une telle démarche suppose de largement faire appel – comme support, soutien et éclairage – à d’autres disciplines telles que l’histoire des sciences et l’histoire de l’art. Récemment, l’histoire des sciences a été particulièrement attentive aux stratégies d’écriture, aux genres [13], et plus généralement à l’aspect historique des formes textuelles [14]. Ont émergé des questions liées à la matérialité de la culture scientifique ses instruments et ses pratiques mais aussi ses textes. Il est donc logique que ce soit précisément les études s’attachant à la culture matérielle » de la science qui aient su le mieux mettre en évidence ses technologies littéraires [15] », qu’il s’agisse de l’énonciation, de la sémiotique, des stratégies d’écriture [16] ou de l’attention au lectorat. On le voit, l’histoire et sociologie des sciences la plus ouverte autrement appelée science studies rejoint ici certaines des préoccupations de la sociologie de la littérature [17], de l’histoire de la lecture [18] et de l’histoire du livre [19].La poule et l’œuf8Le rapport du littéraire » et du scientifique » peut paraître simple si on l’envisage uniquement comme un travail de réécriture littéraire effectué à partir d’un matériau disponible, celui des nouvelles théories scientifiques ; travail littéraire qui peut s’apparenter à la mise en fiction des connaissances, ou bien à l’ornementation d’un discours aride. Compris dans un sens unilatéral, le rapport du littéraire et du scientifique postule une définition fixée de chacun des deux domaines. Ce sont de telles définitions qui peuvent légitimer une approche classique de l’étude conjointe de la littérature et de la science étudier les influences de l’une sur l’autre généralement de la science sur la littérature [20]. Or cette méthode a depuis longtemps démontré ses limites, notamment pour la période classique. Les deux discours sont alors chacun en constitution et témoignent bien plutôt d’un trouble des catégories. Au début du XVIIe siècle, l’humanisme renaissant constitue le cadre dans lequel se comprend l’émergence du discours scientifique et, de fait, la science comme telle n’a pas encore de lieu propre. Loin d’être un simple matériau dans lequel les écrivains puiseraient, la philosophie naturelle construit alors son discours comme ses méthodes en rapport avec ceux des littérateurs. Tenter de renouer les fils de ces deux histoires, voire faire l’hypothèse d’une histoire commune, c’est être attentif aux outils partagés, que ceux-ci procèdent d’un socle commun littérature et philosophie classiques, concepts rhétoriques et poétiques hérités de l’humanisme renaissant, repris ou transformés au début du XVIIe siècle, ou qu’ils proviennent d’emprunts et d’échanges entre les deux domaines. 9Cette seconde manière d’aborder l’étude de la science et de la littérature considère que les formes littéraires sont aussi des formes de pensée et, par suite, que la notion d’influence n’est pas opératoire. Une telle méthode implique de définir un corpus large, qui ne préjuge pas a priori de l’appartenance des textes aux domaines du littéraire » ou du scientifique ». D’où l’intérêt de réunir, et souvent de confronter, des textes qui dialoguent par-delà les frontières qu’on leur assigne spontanément. Prenons l’exemple du XVIIe siècle. L’imaginaire scientifique irrigue toute la littérature de l’époque. Il suffit pour s’en convaincre de rappeler qu’on trouve des références aux récentes découvertes et aux controverses scientifiques contemporaines chez Molière comme chez Aphra Behn, chez Milton aussi bien que chez La Fontaine [21]. Cependant, les textes abordant de front les sujets savants appartiennent le plus souvent à ce genre en construction et en quête de légitimité qu’est la fiction littéraire, que l’on appellera bientôt roman. Sans doute l’alliance de la fiction et du savoir n’est-elle pas nouvelle. Nombreux sont les récits de la Renaissance qui s’apparentent à des romans encyclopédiques et savants [22]. Néanmoins, l’intérêt particulier pour la science dont témoignent les fictions du XVIIe siècle engage un imaginaire particulier. Il faut donc distinguer les textes qui empruntent à la science une topique et ceux dont la science informe la poétique. Dans la première catégorie, on trouve l’importante tradition de la poésie scientifique [23] et des pièces de théâtre françaises et anglaises de la fin du siècle exploitant le thème spectaculaire du monde dans la Lune [24] ; dans la seconde, on compte des traités scientifiques empruntant leurs techniques aux contes philosophiques antiques et médiévaux, et des fictions narratives. Au XVIIe siècle, les textes ayant partie liée avec la science ne s’ordonnent donc pas en une typologie simple qui distinguerait comptes rendus d’expérience, traités théoriques, ouvrages de vulgarisation et romans scientifiques. Si parfois les œuvres tendent à s’organiser selon ces pôles, surtout pendant la deuxième moitié du siècle, bien souvent ces classifications ne sont pas pertinentes, et l’on se trouve face à un continuum de textes allant du plus théorique au plus fictionnel. Afin de signaler qu’il s’agit de tendances et non d’une frontière infranchissable, nous avons proposé les catégories de récits fictionnalisants pour les textes allant vers la fiction sans pour autant renoncer à toute ambition cognitive et de récits factualisants pour les textes qui s’efforcent de construire des faits sans pour autant renoncer au recours ponctuel à la fiction [25]. Plutôt que de désigner des domaines fixes, cette formulation tente de saisir une gradation de fictionnalité et de et zones d’échange10Étudier les relations de la littérature et de la science, c’est se confronter à l’histoire d’une division, autant qu’étudier des échanges et des convergences. De fait, la copule et ne saisit que très mal cette richesse de relations et d’interactions. Elle est elle-même le résultat d’une histoire de divisions dont nous héritons et qui brouille notre lecture, nous obligeant à un coup de force et d’imagination pour réunir ce que des siècles de spécialisation nous ont habitué à séparer. Le premier problème sur lequel on achoppe est donc l’anachronisme de notre point de vue. Se plonger dans une époque où, par exemple, on peut parler sans copule de Galilée critique d’art », pour reprendre le célèbre article d’Erwin Panofsky, ou de Kepler astronome astrologue », comme le fait Gérard Simon, c’est faire abstraction d’un long processus historique autant que de l’éducation binaire que nous avons reçue, fondée sur la dichotomie entre les scientifiques » et les littéraires ». C’est surtout tâcher de comprendre un temps où les notions mêmes de science » et de littérature » ne sont pas encore constituées, et où les hommes de science sont encore avant tout des honnêtes hommes, des littérateurs et des philosophes. 11Gillian Beer a souligné une autre difficulté méthodologique qui se pose au seuil de ce type d’étude Comment expliquer l’apparition concurrente d’idées similaires en science et en littérature sans inévitablement forger des liens d’inférence causale [26] ? » D’une part, la philosophie naturelle a trouvé dans les formes littéraires disponibles une alternative aux formes strictes du traité scolastique – de nouvelles formes pour de nouveaux sujets. D’autre part, poètes et écrivains », comme on les appellera bientôt, ont trouvé dans la philosophie naturelle, et particulièrement dans l’astronomie, non seulement une riche source d’inspiration, mais un arsenal de nouvelles stratégies d’écriture et de nouveaux usages sur lesquels fonder leur propre réflexion sur le vraisemblable ou sur le récit. Ainsi, entre les deux discours souvent contigus, parfois imbriqués, de la littérature et de la science, des codes et des langages communs sont établis, précisément au moment où les deux disciplines commencent à se distinguer en définissant lieux, institutions et pratiques distincts. Ce faisant, la bifurcation pour le dire ainsi entre ce qu’on appelle aujourd’hui la science » et la littérature » a eu lieu précisément au plus fort de leurs échanges. C’est là un paradoxe qui reste à explorer, de même qu’il reste à écrire l’histoire détaillée de cette division, afin de savoir de quel ordre est la frontière que chaque époque tente de constituer, et où elle se situe. 12Un troisième problème méthodologique a été soulevé par Stephen Greenblatt dans son étude Marvellous Possessions l’usage des méthodes de l’analyse littéraire pour l’étude de textes non-littéraires pose le problème de leur adéquation. Or, de même que les relations de voyage au Nouveau Monde font affleurer à la surface de textes non-littéraires les opérations de l’imagination généralement les plus enfouies [27] », les textes scientifiques font souvent appel à des stratégies d’écritures et à des procédures poétiques qui rendent pertinents les outils de l’analyse littéraire. À cet égard, Gerald Holton a souligné à quel point la dichotomie entre les approches scientifique et littéraire s’estompait dès lors que l’on se place au niveau de la construction des théories scientifiques, notamment au moment de la formation et de l’évaluation des hypothèses [28]. 13On comprend pourquoi la notion d’influence, qui a longtemps présidé à l’étude des relations entre science et littérature, est si peu pertinente. Elle postule l’existence de deux disciplines autonomes, d’une hiérarchie implicite, et d’un mouvement unilatéral de l’une la science, source du savoir vers l’autre la littérature, simple support ou moyen de diffusion de ce savoir. À la notion d’influence, insuffisante puisque la périodisation de ces échanges ne permet pas de dégager un mouvement unilatéral [29], on préférera celle de zone d’échange ou trading zone, telle qu’elle a été définie par Peter Galison [30]. Dans cette zone, chaque régime discursif a ses propres enjeux, ses propres dispositifs énonciatifs. Mais chacun interagit avec l’autre selon des procédures communes, un langage partagé, des emprunts réciproques de stratégies d’accréditation et de méthodes. 14La stratégie du chercheur en sciences et littérature est alors toute trouvée en étudiant un corpus qui contredit d’emblée la division des disciplines, ou en s’intéressant à une époque où elle est purement et simplement anachronique, il en démontre de facto le caractère arbitraire, historique et construit. Plus délicate est la tâche lorsqu’on s’avance dans le temps, et que les disciplines littéraires et scientifiques commencent à se définir en s’opposant. Les liens perdurent, mais un et s’impose comme copule nécessaire entre deux territoires qui s’éloignent. 15Les difficultés méthodologiques propres à ce domaine d’exploration hybride ont donc permis le développement de nouvelles approches, dont les études littéraires ont largement profité. Bénéfice méthodologique d’abord en élargissant le champ des objets étudiés, on interroge la pertinence des méthodes disponibles, on révise l’outillage conceptuel de l’analyse littéraire, ce qui a permis par exemple l’approche renouvelée de grandes notions littéraires telles que la vraisemblance, la fiction, le récit. Réfléchir à partir de la frontière, c’est adopter une perspective qui permet de mettre au jour des textes oubliés, un corpus souvent mal ou méconnu, car il n’entre pas dans les catégories traditionnelles du canon de l’histoire littéraire ou de l’histoire des sciences. Bénéfice conceptuel surtout l’une des pistes empruntées par les recherches littéraires actuelles consiste à sortir du champ de la littérature afin de mieux le saisir, et de percevoir la fécondité du littéraire » par-delà les bornes institutionnelles de la littérature. Se développe ainsi une approche de la forme littéraire non pas coupée du monde, mais en interaction avec d’autres savoirs et objets du monde. Loin de n’être qu’un réceptacle pour un savoir scientifique en train de se faire, la littérature peut être conçue comme un mode singulier de connaissance. C’est l’une des hypothèses les plus fructueuses des études littéraires actuelles [31]. 16Du point de vue de l’histoire des sciences, les bénéfices ne sont pas moindres. Le rapprochement avec l’histoire littéraire permet d’envisager la science comme une partie intégrante, et importante, de la culture, revendication des scientifiques souvent trop peu entendue. Comme le signale l’historien des sciences Mario Biagioli, un outil classique de l’analyse littéraire – l’étude des structures d’un texte – est devenu un enjeu essentiel des science studies. Il suggère même que les enseignants des départements de littérature s’allient avec les chercheurs en science studies afin d’apprendre à leurs étudiants comment analyser la construction littéraire du discours scientifique [32]. Un mouvement de désenclavement de l’histoire des sciences se dessine ainsi, qui fait écho à l’ouverture des études littéraires. Cette ouverture symétrique témoigne ainsi d’une volonté d’interroger, et de remettre en cause, les grandes partitions binaires de la pensée occidentale. Notes [1] A. N. Whitehead, Science and the Modern World, Cambridge, Cambridge University Press, 1925, p. 55. [2] M. Serres, Hermès V Le Passage du Nord-Ouest, Paris, Minuit, 1980. [3] M. Serres, Feux et signaux de brume, Paris, Grasset, 1975. [4] Ibid., p. 14. [5] Ibid., p. 12-13. [6] Voir L. J. Jordanova et R. Williams, Languages of nature critical essays on science and literature, Londres, Free association books, 1986 ; G. Levine éd., One Culture Essays on Science and Literature, Madison, University of Wisconsin Press, 1987 ; J. Christie et S. Shuttleworth, Nature transfigured Science and literature 1700-1900, Manchester, Manchester University Press, 1989. [7] A World in the Moon a Study of the Changing Attitude toward the Moon in the Seventeenth and Eighteenth Centuries, Northamptan Mass., Smith college Departments of modern languages, 1936 ; Kepler, the Somnium and John Donne », Journal of the History of Ideas, I, 1940, p. 259-280 ; Science and Imagination, Ithaca, Cornell University Press, 1956 ; Voyages to the moon, New York, Macmillan Co., 1960 ; The Breaking of the Circle. Studies in the effects of the New Science » upon Seventeenth Century Poetry, New York / Londres, Columbia University Press, 1962. [8] F. Hallyn, La Structure poétique du monde Copernic, Kepler, Paris, Le Seuil, 1987. [9] A. Lovejoy, The Great Chain of Being A Study of the History of an idea, Cambridge Mass., Harvard University Press, 1936. [10] L. Davis, Factual Fictions The Origins of the English Novel, New York, Columbia University Press, 1983 ; M. McKeon, The Origins of the English novel 1600-1740, Baltimore, John Hopkins University Press, 1987 ; T. Pavel, Univers de la fiction, Paris, Le Seuil, 1988 ; Pageaux, Naissances du roman, Paris, Klincksieck, 1995 ; M. DiLonardo Troiano, New physics and the modern French novel an investigation of interdisciplinary discourse, Currents in comparative Romance languages and literatures, New York, P. Lang, 1995 ; R. Mayer, History and the early English novel matters of fact from Bacon to Defoe, Cambridge, Cambridge University Press, 1997 ; F. Garavini, La Maison des jeux. Science du roman et roman de la science au XVIIe siècle [1980], trad. A. Estève, Paris, Champion, 1998 ; T. Pavel, La Pensée du roman, Paris, Gallimard, 2003. [11] Voir J. Dietz Moss, Novelties in the Heavens. Rhetoric and Science in the Copernican Controversy, Chicago, Chicago University Press, 1993 ; J. Fahnestock, Rhetorical Figures in Science, Oxford, Oxford University Press, 1999 ; T. Skouen et R. Stark dir., Rhetoric and The Early Royal Society, Leyde, Brill, ligne [12] Voir H. S. Turner, The English Renaissance Stage Geometry, Poetics and the Practical Spatial Arts 1580-1630, Oxford, Oxford University Press, 2006 ; H. Marchitello, The Machine in the Text Science and Literature in the Age of Shakespeare and Galileo, Oxford, Oxford University Press, 2011 ; Fr. Aït-Touati, Contes de la Lune essai sur la fiction et la science modernes, Paris, Gallimard, Paris, 2011. [13] A. Blair, Theatre of Nature, Princeton, Princeton University Press, 1997 ; A. Steczowicz, The Defence of Contraries ». Paradox in the Late Renaissance Disciplines, thèse de doctorat, University of Oxford, 2004 ; J. Paradis, Montaigne, Boyle and the Essay of Experience », dans G. Levine éd., One Culture, op. cit., p. 59-91. [14] P. Dear dir., The Literary Structure of Scientific Argument Historical Studies, Philadelphie, Pennsylvania University Press, 1991 ; R. Westman, Proof, Poetics and Patronage Copernicus’s Preface to De Revolutionibus », dans D. C. Lindberg et R. S. Westman éd., Reappraisals of the Scientific Revolution, Cambridge Mass., Cambridge University Press, 1990, p. 167-205 ; C. Licoppe, La Formation de la pratique scientifique. Le discours de l’expérience en France et en Angleterre 1630-1682, Paris, La Découverte, 1996. [15] Dans ces deux domaines, l’ouvrage fondateur est celui de S. Schaffer et S. Shapin, Leviathan and the air-pump Hobbes, Boyle, and the experimental life, Princeton, Princeton University Press, 1985. Voir aussi S. Shapin, A Social History of Truth, Chicago, University of Chicago Press, 1994 ; P. Dear, Discipline and Experience the Mathematical Way in the Scientific Revolution, Chicago, University of Chicago Press, 1995 ; S. Schaffer, La Fabrique des sciences modernes, trad. S. Van Damme, L. Marcou et Fr. Aït-Touati, Paris, Le Seuil, 2014. [16] Voir B. Latour, La rhétorique scientifique qu’est-ce que la force d’un argument ? », dans F. Bailly dir., Sens et place des connaissances dans la société, Paris, CNRS, Paris, 1986, p. 251-287 ; Science in Action how to follow scientists and engineers through society, Cambridge Mass., Harvard University Press, 1987 ; B. Latour et F. Bastide, L’opéra du rein – mise en scène, mise en fait », dans B. Latour, Petites leçons de sociologie des sciences, Paris, Seuil, 1996, p. 83-99 [déjà paru en 1993 sous le titre La Clef de Berlin et autres leçons d’un amateur de sciences]. [17] A. Viala, Naissance de l’écrivain. Sociologie de la littérature à l’âge classique, Paris, Minuit, 1985. [18] R. Chartier et G. Cavallo dir., Histoire de la lecture dans le monde occidental, Paris, Le Seuil, 1997 ; M. Rosellini, Lecture et Connaissance des bons livres ». Charles Sorel et la formation du lecteur, thèse de doctorat, Université de Paris III, 2004. [19] E. Eisenstein, The Printing Revolution in Early Modern Europe, Cambridge, Cambridge University Press, 1983 ; M. Frasca-Spada et N. Jardine dir., Books and the Sciences in History, Cambridge, Cambridge University Press, 2000. [20] Dans cette tradition, fort utile au demeurant puisqu’elle a mis en lumière des conjonctions et des interactions, on peut citer, en France, Bridenne, La Littérature française d’imagination scientifique, Paris, G. A. Dassonville, 1950 ; et aux États-Unis, R. Foster Jones, The Seventeenth Century Studies in the History of English Thought and Literature from Bacon to Pope, Stanford, Stanford University Press, 1951. [21] J. S. Spink, Literature and the Sciences in the Age of Molière, conférence inaugurale donnée au Collège de Bedford 20 janvier 1953, Londres, International Book Club, 1953. [22] Voir F. Béroalde de Verville, Le Cabinet de Minerve auquel sont plusieurs singularités. Figures. Tableaux. Antiques. Recherches saintes. Remarques serieuses. Observations amoureuses. Subtilités agréables. Rencontres joyeuses et quelques histoires meslées és avantures de la sage Fenisse patron du Devoir, Paris, M. Guillemot, 1596 éd. Fanlo, à paraître ; A. Domayron, Histoire du siege des Muses, ou parmi le chaste Amour est traicté de plusieurs belles et curieuses Sciences, Divine Moralle et Naturelle, Architecture, Alchimie, peincture et autres, Lyon, S. Rigaud, 1610. [23] Pour l’Angleterre, outre les travaux cités de M. H. Nicolson, voir M. Llasera, Représentations scientifiques et images poétiques en Angleterre au XVIIe siècle à la recherche de l’invisible, Paris, CNRS, 1999. Pour la France, voir Ph. Chométy, Philosopher en langage des dieux ». La poésie d’idées en France au siècle de Louis XIV, Paris, Champion, 2006. [24] Citons notamment A. de Fatouville, Arlequin empereur de la Lune [1684], dans Le Théâtre italien ou Le Recueil général de toutes les comédies et scènes françaises jouées par les comédiens italiens du roi, éd. T. Gherardi, Paris, Briasson, 1741, t. I ; A. Behn, The Emperor of the Moon, Londres, J. Knight, 1687 ; Th. d’Urfey, Wonders in the Sun. A Comick Opera, Londres, J. Tonson, 1706 ; E. Settle, The World in the Moon, an Opera, Londres, A. Roper, 1697. [25] Fr. Aït-Touati, Penser le ciel à l’âge classique. Fiction, hypothèse et astronomie de Kepler à Huygens », Annales. Histoire et Sciences Sociales, mars-avril 2010, p. 325-344. [26] G. Beer, Open Fields Science in Cultural Encounter, Oxford, Clarendon Press, 1996, chap. 8, p. 177 sq. [27] S. Greenblatt, Marvelous Possessions the Wonder of the New World, Oxford, Clarendon Press, 1990, p. 23. [28] G. Holton, L’Imagination scientifique, Paris, Gallimard, 1981 ; id., L’Invention scientifique, Paris, Puf, 1982. C’est de ce même constat que part F. Hallyn dans son introduction à La Structure poétique du monde, op. cit. [29] À ce titre, les importants travaux de R. Foster Jones, tâchant de saisir l’influence du style scientifique » mis en place par la Royal Society sur » la littérature anglaise de la fin du XVIIe siècle, ont fait l’objet de sévères critiques qui ont pointé les problèmes et les limites d’une telle méthodologie. Voir R. F. Jones, Science and English Prose Style in the Third Quarter of the Seventeenth Century », Publications of the Modern Language Association of America, vol. 45, 1930, p. 977-1009 ; The Seventeenth Century Studies in the History of English Thought and Literature from Bacon to Pope, Stanford, Stanford University Press, 1951 ; Ancients and Moderns A study of the rise of the scientific movement in seventeenth-century England, Saint-Louis Miss., Washington University Press, 1961. Cf. les critiques notamment de B. Vickers, The Royal Society and English Prose Style A Reassessment », dans B. Vickers et N. S. Struever, Rhetoric and the Pursuit of Truth Language change in the Seventeenth and Eighteenth Centuries, Los Angeles, University of California, 1985, p. 3-76. [30] P. Galison, Image and Logic. A Material Culture of Microphysics, Chicago, University of Chicago Press, 1998. En ce qui concerne cette représentation des relations entre littérature et science, je donne à la notion de zone d’échange une extension plus large que celle que propose P. Galison. [31] Citons notamment, au-delà des études consacrées à la Renaissance et à l’âge classique, les travaux de Marielle Macé et d’Yves Citton, qui proposent d’envisager la littérature comme ressource ». [32] M. Biagioli, Postdisciplinary Liaisons Science Studies and the Humanities », Critical Inquiry, vol. 35, 2009, p. 816-833, notamment p. ligne
Invisibleaux yeux du monde, la jeune fille autrefois rêveuse disparaît peu à peu face à la tyrannie de sa belle-mère et la pression étouffante de devoir donner naissance à un fils. Mais comble du déshonneur, Isra ne met au monde que des filles, dont la fougueuse Deya BROOKLYN, 2008. Deya, 18 ans, est en âge d’être mariée. Elle vit avec ses sœurs et ses
L'auteur Guy de Maupassant L'auteur de Lettre d'un Fou est l'un des plus grands auteurs français ! Maupassant est un auteur du XIXème siècle qui est tout aussi connu que ses pairs, qu'il a d'ailleurs côtoyé, Emile Zola et Gustave Flaubert. Il est né en 1850 et est décédé en 1893. Maupassant est l'auteur de nombreuses nouvelles dont Lettre d'un Fou, mais également de romans comme Bel-Ami ou La Parure qui furent de grands succès. Voici un tableau récapitulatif des plus grandes œuvres de Maupassant TitreGenreDate Boule de SuifNouvelle1880 La Maison TellierNouvelle1881 Mademoiselle FifiNouvelle1882 Une VieRoman1883 ApparitionNouvelle1883 Contes de la BécasseRecueil de Nouvelles1883 Une VendettaNouvelle1883 La ParureNouvelle1884 Le Lit 29Nouvelle1884 ToineNouvelle1885 Bel-AmiRoman1885 Voyage de SantéNouvelle1886 Le Petit FûtNouvelle1886 Le HorlaNouvelle1887 Le Rosier de Mme HussonNouvelle1887 Pierre et JeanRoman1888 Les meilleurs professeurs de Français disponibles4,9 70 avis 1er cours offert !5 85 avis 1er cours offert !4,9 117 avis 1er cours offert !5 39 avis 1er cours offert !4,9 56 avis 1er cours offert !5 38 avis 1er cours offert !4,9 17 avis 1er cours offert !5 111 avis 1er cours offert !4,9 70 avis 1er cours offert !5 85 avis 1er cours offert !4,9 117 avis 1er cours offert !5 39 avis 1er cours offert !4,9 56 avis 1er cours offert !5 38 avis 1er cours offert !4,9 17 avis 1er cours offert !5 111 avis 1er cours offert !C'est partiLettre d'un Fou Partie 1 Lisez en intégralité la nouvelle Lettre d'un Fou grâce à Superprof ! Mon cher docteur, je me mets entre vos mains. Faites de moi ce qu'il vous plaira. Je vais vous dire bien franchement mon étrange état d'esprit, et vous apprécierez s'il ne vaudrait pas mieux qu'on prît soin de moi pendant quelque temps dans une maison de santé plutôt que de me laisser en proie aux hallucinations et aux souffrances qui me harcèlent. Voici l'histoire, longue et exacte, du mal singulier de mon âme. Je vivais comme tout le monde, regardant la vie avec les yeux ouverts et aveugles de l'homme, sans m'étonner et sans comprendre., Je vivais comme vivent les bêtes, comme nous vivons tous, accomplissant toutes les fonctions de l'existence, examinant et croyant voir, croyant savoir, croyant connaître ce qui m'entoure, quand, un jour, je me suis aperçu que tout est faux. C'est une phrase de Montesquieu qui a éclairé brusquement ma pensée. La voici "Un organe de plus ou de moins dans notre machine nous aurait fait une autre intelligence. Enfin toutes les lois établies sur ce que notre machine est d'une certaine façon seraient différentes si notre machine n'était pas de cette façon." J'ai réfléchi à cela pendant des mois, des mois et des mois, et., peu à peu, une étrange clarté est entrée en moi, et cette clarté y a fait la nuit. En effet, nos organes sont les seuls intermédiaires entre le monde extérieur et nous. C'est-à -dire que l'être intérieur, qui constitue le moi, se trouve en contact, au moyen de quelques filets nerveux, avec l'être extérieur qui constitue le monde. Or, outre que cet être extérieur nous échappe par ses proportions, sa durée, ses propriétés innombrables et impénétrables, ses origines, son avenir ou ses fins, ses formes lointaines et ses manifestations infinies, nos organes ne nous fournissent encore sur la parcelle de lui que nous pouvons connaître que des renseignements aussi incertains que peu nombreux. Incertains, parce que ce sont uniquement les propriétés de nos organes qui déterminent pour nous les propriétés apparentes de la matière. Peu nombreux, parce que nos sens n'étant qu'au nombre de cinq, le champ de leurs investigations et la nature de leurs révélations se trouvent fort restreints. Je m'explique. - L'oeil nous indique les dimensions, les formes et les couleurs. Il nous trompe sur ces trois points. Il ne peut nous révéler que les objets et les êtres de dimension moyenne, en proportion avec la taille humaine, ce qui nous a amenés à appliquer le mot grand à certaines choses et le mot petit à certaines autres, uniquement parce que sa faiblesse ne lui permet pas de connaître ce qui est trop vaste ou trop menu pour lui. D'où il résulte qu'il ne sait et ne voit presque rien, que l'univers presque entier lui demeure caché, l'étoile qui habite l'espace et l'animalcule qui habite la goutte d'eau. S'il avait même cent millions de fois sa puissance normale, s'il apercevait dans l'air que nous respirons toutes les races d'êtres invisibles, ainsi que les habitants des planètes voisines, il existerait encore des nombres infinis de races de bêtes plus petites et des mondes tellement lointains qu'il ne les atteindrait pas. Donc toutes nos idées de proportion sont fausses puisqu'il n'y a pas de limite possible dans la grandeur ni dans la petitesse. Notre appréciation sur les dimensions et les formes n'a aucune valeur absolue, étant déterminée uniquement par la puissance d'un organe et par une comparaison constante avec nous-mêmes. Ajoutons que l'oeil est encore incapable de voir le transparent. Un verre sans défaut le trompe. Il le confond avec l'air qu'il ne voit pas non plus. Passons à la couleur. La couleur existe parce que notre oeil est constitué de telle sorte qu'il transmet au cerveau, sous forme de couleur, les diverses façons dont les corps absorbent et décomposent, suivant leur constitution chimique, les rayons lumineux qui les frappent. Toutes les proportions de cette absorption et de cette décomposition constituent les nuances. Donc cet organe impose à l'esprit sa manière de voir, ou mieux sa façon arbitraire de constater les dimensions et d'apprécier les rapports de la lumière et de la matière. Examinons l'ouïe. Plus encore qu'avec l'oeil, nous sommes les jouets et les dupes de cet organe fantaisiste. Deux corps se heurtant produisent un certain ébranlement de l'atmosphère. Ce mouvement fait tressaillir dans notre oreille une certaine petite peau qui change immédiatement en bruit ce qui n'est, en réalité, qu'une vibration. La nature est muette. Mais le tympan possède la propriété miraculeuse de nous transmettre sous forme de sens, et de sens différents suivant le nombre des vibrations, tous les frémissements des ondes invisibles de l'espace. . Cette métamorphose accomplie par le nerf auditif dans le court trajet de l'oreille au cerveau nous a permis de créer un art étrange, la musique, le plus poétique et le plus précis des arts, vague comme un songe et exact comme l'algèbre. Comment trouver des cours de français afin de réviser ? Lettre d'un Fou Partie 2 Il faut s'accrocher pour lire toute la nouvelle Lettre d'un Fou ! Que dire du goût et de l'odorat ? Connaîtrions-nous les parfums et la qualité des nourritures sans les propriétés bizarres de notre nez et de notre palais ? L'humanité pourrait exister cependant sans l'oreille, sans le goût et sans l'odorat, c'est-à -dire sans aucune notion du bruit, de la saveur et de l'odeur. Donc, si nous avions quelques organes de moins, nous ignorerions d'admirables et singulières choses, mais si nous avions quelques organes de plus, nous découvririons autour de nous une infinité d'autres choses que nous ne soupçonnerons jamais faute de moyen de les constater. Donc, nous nous trompons en jugeant le Connu, et nous sommes entourés d'inconnu inexploré. Donc, tout est incertain et appréciable de manières différentes. Tout est faux, tout est possible, tout est douteux. Formulons cette certitude en nous servant du vieux dicton "Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà ." Et disons vérité dans notre organe, erreur à côté. Deux et deux ne doivent plus faire quatre en dehors de notre atmosphère. Vérité sur la terre, erreur plus loin, d'où je conclus que les mystères entrevus comme l'électricité, le sommeil hypnotique, la transmission de la volonté, la suggestion, tous les phénomènes magnétiques, ne nous demeurent cachés, que parce que la nature ne nous a pas fourni l'organe, ou les organes nécessaires pour les comprendre. Après m'être convaincu que tout ce que me révèlent mes sens n'existe que pour moi tel que je le perçois et serait totalement différent pour un autre être autrement organisé, après en avoir conclu qu'une humanité diversement faite aurait sur le monde, sur la vie, sur tout, des idées absolument opposées aux nôtres, car l'accord des croyances ne résulte que de la similitude des organes humains, et les divergences d'opinions ne proviennent que des légères différences de fonctionnement de nos filets nerveux, j'ai fait un effort de pensée surhumain pour soupçonner l'impénétrable qui m'entoure. Suis-je devenu fou ? Je me suis dit "Je suis enveloppé de choses inconnues." J'ai supposé l'homme sans oreilles et soupçonnant le son comme nous soupçonnons tant de mystères cachés, l'homme constatant des phénomènes acoustiques dont il ne pourrait déterminer ni la nature, ni la provenance. Et j'ai eu peur de tout, autour de moi, peur de l'air, peur de la nuit. Du moment que nous ne pouvons connaître presque rien, et du moment que tout est sans limites, quel est le reste ? Le vide n'est pas ? Qu'y a-t-il dans le vide apparent ? Et cette terreur confuse du surnaturel qui hante l'homme depuis la naissance du monde est légitime puisque le surnaturel n'est pas autre chose que ce qui nous demeure voilé ! Alors j'ai compris l'épouvante. il m'a semblé que je touchais sans cesse à la découverte d'un secret de l'univers. J'ai tenté d'aiguiser mes organes, de les exciter, de leur faire percevoir par moments l'invisible. Je me suis dit "Tout est un être. Le cri qui passe dans l'air est un être comparable à la bête puisqu'il naît, produit un mouvement, se transforme encore pour mourir. Or, l'esprit craintif qui croit à des êtres incorporels n'a donc pas tort. Qui sont-ils ?" Combien d'hommes les pressentent, frémissent à leur approche, tremblent à leur inappréciable contact. On les sent auprès de soi, autour de soi, mais on ne les peut distinguer, car nous n'avons pas l'oeil qui les verrait, ou plutôt l'organe inconnu qui pourrait les découvrir. Alors, plus que personne, je les sentais, moi, ces passants surnaturels. Etres ou mystères ? Le sais-je ? Je ne pourrais dire ce qu'ils sont, mais je pourrais toujours signaler leur présence. Et j'ai vu - j'ai vu un être invisible - autant qu'on peut les voir, ces êtres. Lettre d'un Fou Partie 3 Lettre d'un Fou est le récit d'un malade qui parle à son docteur. Je demeurais des nuits entières immobile, assis devant ma table, la tête dans mes mains et songeant à cela, songeant à eux. Souvent j'ai cru qu'une main intangible, ou plutôt qu'un corps insaisissable, m'effleurait légèrement les cheveux. Il ne me touchait pas, n'étant point d'essence charnelle, mais d'essence impondérable, inconnaissable. Or, un soir, j'ai entendu craquer mon parquet derrière moi. Il a craqué d'une façon singulière. J'ai frémi. Je me suis tourné. Je n'ai rien vu. Et je n'y ai plus songé. Mais le lendemain, à la même heure, le même bruit s'est produit. J'ai eu tellement peur que je me suis levé, sûr, sûr, sûr, que je n'étais pas seul dans ma chambre. On ne voyait rien pourtant. L'air était limpide, transparent partout. Mes deux lampes éclairaient tous les coins. Le bruit ne recommença pas et je me calmai peu à peu ; je restais inquiet cependant, je me retournais souvent. Le lendemain je m'enfermai de bonne heure, cherchant comment je pourrais parvenir à voir l'invisible qui me visitait. Et je l'ai vu. J'en ai failli mourir de terreur. J'avais allumé toutes les bougies de ma cheminée et de mon lustre. La pièce était éclairée comme pour une fête. Mes deux lampes brûlaient sur ma table. En face de moi, mon lit, un vieux lit de chêne à colonnes. A droite, ma cheminée. A gauche, ma porte que j'avais fermée au verrou. Derrière moi. une très grande armoire à glace. Je me regardai dedans. J'avais des yeux étranges et les pupilles très dilatées. Puis je m'assis comme tous les jours. Le bruit s'était produit, la veille et l'avant-veille, à neuf heures vingt-deux minutes. J'attendis. Quand arriva le moment précis, je perçus une indescriptible sensation, comme si un fluide, un fluide irrésistible eût pénétré en moi par toutes les parcelles de ma chair, noyant mon âme dans une épouvante atroce et bonne. Et le craquement se fit, tout contre moi. Je me dressai en me tournant si vite que je faillis tomber. On y voyait comme en plein jour, et je ne me vis pas dans la glace ! Elle était vide, claire, pleine de lumière. Je n'étais pas dedans, et j'étais en face, cependant. Je la regardais avec des yeux affolés. Je n'osais pas aller vers elle, sentant bien qu'il était entre nous, lui, l'invisible, et qu'il me cachait. Oh ! comme j'eus peur ! Et voilà que je commençai à m'apercevoir dans une brume au fond du miroir, dans une brume comme à travers de l'eau ; et il me semblait que cette eau glissait de gauche à droite, lentement, me rendant plus précis de seconde en seconde. C'était comme la fin d'une éclipse. Ce qui me cachait n'avait pas de contours, mais une sorte de transparence opaque s'éclaircissant peu à peu. Et je pus enfin me distinguer nettement, ainsi que je le fais tous les jours en me regardant. Je l'avais donc vu ! Et je ne l'ai pas revu. Mais je l'attends sans cesse, et je sens que ma tête s'égare dans cette attente. Je reste pendant des heures, des nuits, des jours, des semaines, devant ma glace, pour l'attendre ! Il ne vient plus. Il a compris que je l'avais vu. Mais moi je sens que je l'attendrai toujours, jusqu'à la mort, que je l'attendrai sans repos, devant cette glace, comme un chasseur à l'affût. Et, dans cette glace, je commence à voir des images folles, des monstres, des cadavres hideux, toutes sortes de bêtes effroyables, d'êtres atroces, toutes les visions invraisemblables qui doivent hanter l'esprit des fous. Voilà ma confession, mon cher docteur. Dites-moi ce que je dois faire ?
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